La primauté de la loi européenne sur la loi nationale

par Dan Voiculescu, Vice-président du Sénat (Senatul Romãniei)

Établissant un régime semi-présidentiel où le Président est élu au suffrage direct et le Gouvernement est responsable devant le Parlement, la première Constitution de la Roumanie post-totalitaire a prévu un système bicaméral, avec des pouvoirs équivalents pour les deux Chambres. Cette structure bicamérale a réussi à fournir un cadre propice à la construction d’une vie démocratique saine. Cependant, lors du processus d’adhésion à l’Union européenne, plusieurs questions constitutionnelles ont émergé, en grande partie en raison des difficultés à légiférer simultanément et des dispositions ambiguës concernant les droits de l’Homme. Ces questions ont conduit à une révision constitutionnelle en 2003, visant à adapter la loi fondamentale aux normes exigées par les statuts des membres de l’UE. Cette révision a principalement porté sur le processus législatif et les compétences des deux Chambres.

Malgré ces amendements, les principaux pouvoirs constitutionnels des deux Chambres ont été maintenus, bien qu’ils soient devenus plus efficaces. Ainsi, la Chambre des Députés joue le rôle d’une Assemblée décisionnelle courante, tandis que le Sénat, selon une règle d’exception, est chargé de la ratification des traités et des lois organiques qui régulent l’État, les médias et les aspects de la sécurité nationale. La Constitution révisée clarifie le principe de séparation des pouvoirs et renforce le rôle du Parlement, le Premier Ministre étant responsable uniquement devant le Parlement, tandis que le Président ne peut pas le révoquer. En outre, une nouvelle disposition constitutionnelle établit la primauté du droit européen sur le droit national, ce qui devrait garantir une application cohérente de la législation européenne.

Malgré la révision constitutionnelle adoptée il y a six ans, qui a commencé à clarifier les pouvoirs des deux Chambres, le débat initié par le Président de la République sur la création d’un Parlement unicaméral met en avant le chevauchement des compétences comme un argument pour l’abandon du système bicaméral. Dans ce contexte et compte tenu du rôle croissant des Parlements nationaux dans la prise de décision au sein de l’Union européenne, il est nécessaire d’adapter rapidement la Constitution pour renforcer le rôle du Législatif. Au-delà de la ratification du Traité de Lisbonne, les relations entre les Parlements nationaux et les institutions européennes devraient nécessiter une meilleure implication des deux Chambres pour appliquer un contrôle préalable strict aux actes européens.

Le nouveau pouvoir législatif national devra se baser sur l’adaptation et l’intégration des normes communautaires dans le système judiciaire national et sur une coopération renforcée avec l’Exécutif. Ainsi, les procédures parlementaires devraient être soumises à un « filtre » avancé, étant donné que les deux Chambres doivent examiner l’activité du Gouvernement dans le cadre des Affaires européennes. Il est crucial pour les citoyens roumains que les deux Chambres assument pleinement leurs responsabilités pour débattre et contrôler les politiques européennes, influençant ainsi les décisions prises à Bruxelles. En collaborant étroitement avec les autres Parlements des États membres, le Sénat roumain s’engage à renforcer et à clarifier le processus de prise de décision européen.