Une nouvelle diplomatie
parlementaire franco-allemande :
un alignement des planètes
pour une relance du projet européen ?
La question n’est plus de savoir comment l’Europe peut progresser ; elle est de savoir si elle peut encore être sauvée. La génération de nos grands-parents a été visionnaire et a construit l’Europe. Celle de nos parents l’a développée et l’a gérée. Notre génération a désormais la lourde responsabilité de la réinventer…
La renégociation du Traité de l’Élysée a été l’élément déclencheur d’une nouvelle approche des relations parlementaires franco-allemandes. Un groupe transpartisan de 18 Députés allemands et français, nommés par les Bureaux des deux Assemblées, oeuvre depuis dix mois et propose d’écrire une nouvelle page de nos relations inter-parlementaires et donc, une nouvelle page européenne. Cette approche se fonde sur une conviction profonde : à l’heure des doutes et des blocages, c’est à nouveau dans le couple franco-allemand qu’il faut chercher la solution d’une reconstruction européenne, dans l’esprit même des Pères fondateurs.
Et un certain « alignement des planètes » semble se dessiner…
D’une part, avec la déclaration de Meseberg, la Chancelière Merkel et le Président Macron ont fixé une feuille de route claire, avec des avancées majeures sur la réforme de la zone euro, en particulier concernant la réalisation concrète d’une convergence économique, sociale et fiscale et la mise en place d’un budget de la zone euro.
D’autre part, la rencontre des Bureaux de l’Assemblée nationale et du Bundestag à Lubeck en septembre a validé la proposition du Groupe des 18 Députés de mettre en place une Assemblée parlementaire commune aux deux pays. Elle sera composée de 100 députés (50 allemands et 50 français) et aura trois objectifs : suivre la mise en œuvre du Traité de l’Élysée, identifier des positions communes entre nos Commissions parlementaires thématiques et, surtout, travailler sur la convergence de nos deux modèles.
C’est bien là un objectif nouveau. Concrètement, les Députés abordent de front les défis autour de la convergence que les solutions institutionnelles européennes ne sont plus à même de relever. Car sur ce point, la zone euro a une intention de convergence, mais une réalité de divergences, avec des écarts de PIB par habitant qui ne cessent de croître.
Cette convergence passe d’abord par plus de cohérence dans la transposition des directives européennes. Lorsque l’Allemagne et la France transposent une directive de façon identique, c’est presque par hasard, faute de synchronisation des calendriers de transposition et faute de concertation. Il s’agit d’affirmer que, par défaut, il faut transposer de façon identique et, par exception, que chacun transpose à sa façon. De même, faire converger l’environnement réglementaire des entreprises est une priorité : cette Assemblée devra en être l’outil, pour poser les bases d’un véritable Code européen des Affaires.
Ce travail de fond sur la convergence de nos deux modèles pourra s’inspirer de nos dissonances, qui se manifestent pleinement dans les zones frontalières et que nous pourrons ainsi résoudre. Comme je l’exprimais dans un rapport au Premier Ministre sur le Transfrontalier, la nouvelle collectivité européenne d’Alsace sera ainsi un laboratoire et un fer de lance de cette convergence franco-allemande.
Le Traité de l’Élysée devra réaffirmer cette ambition conjointe et l’Assemblée inter-parlementaire commune devra en être l’outil opérationnel. En tant que Membre du Groupe inter-parlementaire franco-allemand des 18 Députés ayant travaillé sur le projet d’Assemblée parlementaire et en tant que Membre du Bureau de l’Assemblée nationale, je m’impliquerai à mon niveau, avec conviction, pour que ce projet soit à la hauteur des enjeux.
En somme, l’année 2018 est une année charnière pour la diplomatie parlementaire franco-allemande qui veut démontrer que l’Europe doit aussi se reconstruire par l’action pragmatique et concertée de nos deux Parlements avec, de facto, un effet d’entraînement sur la convergence dans l’ensemble de la zone euro. Avec la conviction qu’il n’est pas trop tard, mais que, comme dans beaucoup d’autres domaines, il y a comme un air de dernière chance…
Cette Assemblée parlementaire franco-allemande porte l’espoir d’une nouvelle impulsion européenne et toute la responsabilité qui va avec.